Dans cet article publié par Ouest France le 30 janvier, j'ai choisi de parler de Sophie Scholl, une des plus grandes figures de la résistance allemande :
"La sortie sur les écrans français de Walkyrie le film de Bryan Singer sur la vaste conspiration ayant abouti à l’attentat du 20 juillet 1944 contre Adolf Hitler nous offre l’opportunité de célébrer la permanence de la force de la conscience individuelle mise à l’épreuve de la tyrannie d’un pouvoir barbare. Mais, plutôt que de mettre en exergue l’épopée héroïque de quelques officiers déterminés et courageux dont l’audacieux projet fut tenu en échec par ce que l’on a appelé la chance du diable, la résistance allemande, dans sa grande diversité, m’offre l’occasion de vous parler de Sophie Scholl à quelques jours du soixante sixième anniversaire de son assassinat par les nazis.
La résistance de Sophie Scholl est celle, inattendue, d’une jeune femme membre du BND, la branche féminine des jeunesses hitlériennes, qui découvre les crimes des SS grâce au témoignage de son frère Hans qui revient du front de l’Est. À l’horreur des faits, elle oppose sa détermination à informer et ouvrir les yeux de ses concitoyens. Une fois arrêtée par la Gestapo, la force tranquille qui l’anime impressionne jusqu’à l’officier qui l’interroge. L’espace d’un moment, il semble vouloir la sauver avant de l’abandonner à son sort tel un Ponce-Pilate moderne qui rend les armes face à la volonté intangible de Sophie.
La dimension christique de son sacrifice est encore plus évidente lors de son « procès » quand, tenant tête à Roland Freisler, l’implacable et sinistre président du tribunal du peuple, elle déclare que la terreur répandue par les nazis est bientôt finie et que, dans la nouvelle Allemagne libre, siégera un tribunal pour le juger lui et ses comparses. Face à l’aveuglement fanatique, Sophie représente la flamme, vacillante mais toujours lumineuse et jamais éteinte, de l’honneur de l’Allemagne, contrepoint d’une tyrannie diabolique.
« Le soleil brille encore », telles sont les dernières paroles, pleines d’espérance, de Sophie Scholl face à l’échafaud qui, en ce 22 février 1943, met un terme à la courte vie de cette jeune femme de 21 ans, forte de sa foi chrétienne et sûre d’avoir été utile à son pays. Le grand prix Nobel de littérature allemand, Thomas Mann, s’en fait l’écho dès le mois de juin 1943 au micro de la radio de Londres : « Le monde est, aujourd'hui, très profondément ému par les incidents qui se sont déroulés à l'Université de Munich […]. Courageux, magnifiques jeunes gens ! Vous ne serez pas morts en vain, vous ne serez pas oubliés. Les nazis ont élevé des monuments à de solides apaches, à de vulgaires tueurs..., la révolution allemande, la vraie, les détruira et, à leur place, elle immortalisera vos noms, vous qui saviez et qui proclamiez, alors que la nuit couvrait encore l'Allemagne et l'Europe, qu'il naît une foi nouvelle, la foi à l'honneur et à la liberté »."
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire