Habitation détruite et non reconstruiteVoici l'article que Ouest France a publié sous ma signature le 22 mars dernier et qui doit nous inciter à ne pas oublier les ravages durables provoqués par Katrina :
"Le mardi 25 juillet 2000, en milieu de matinée et alors que je participais à un salon informatique à La Nouvelle Orléans, un appel téléphonique de mon épouse m’apprenait que le Concorde venait de s’écraser en faisant 109 morts. Ce drame fut largement commenté par la presse louisianaise qui, avec des mots simples et sincères, témoignait ainsi de l’amitié du plus francophone des états américains pour notre pays.
En ce mercredi 7 mars 2007, j’arrive à La Nouvelle Orléans pour participer à un colloque franco-américain sur la « Reconstruction et la revitalisation des Villes après une catastrophe ». Le taxi qui me conduit de l’aéroport Louis Armstrong jusque vers le « vieux carré » traverse rapidement les banlieues pour atteindre un centre historique laissé intact par le cyclone « Katrina ». Et je me dis que, peut-être, cette belle ville va se relever, plus vite que prévu, de la plus terrible des catastrophes naturelles de l’histoire des Etats-Unis.
C’est peu de dire que ma surprise et mon effroi sont complets quand, le lendemain, je parcours les rues dévastées de Lakeview et du quartier pauvre de La Nouvelle Orléans. Dix-huit mois après une catastrophe qui fit officiellement 1.500 morts (sans compter les milliers de disparus), je vois, de mes propres yeux, une ville encore à 80% détruite. Peut-on écouter, sans en avoir les larmes aux yeux, notre compatriote Isabelle Maret, professeur à l’Université de la Nouvelle-Orléans, nous expliquer, devant sa maison dévastée, qu’elle a tout perdu le 29 Août 2005 hormis la vie ?
Le Président Bush vient de déclarer : « Le sort des louisianais est au cœur des préoccupations du Gouvernement Fédéral ». La vérité oblige à dire que la reconstruction est encore balbutiante et qu’il faudra, selon les spécialistes, entre 10 et 30 ans pour que la ville puisse être reconstruite et encore pas totalement. La vérité oblige à dire qu’en 2006 il y a eu 161 meurtres et que la criminalité qui avait baissé avant « Katrina » est remontée depuis à un taux sept fois supérieur à la moyenne nationale faisant de La Nouvelle Orléans la ville la plus dangereuse des Etats-Unis. La vérité oblige à dire que des reconstructions, autant dérisoires que pathétiques, sont engagées de façon anarchique par ceux qui veulent habiter de nouveau dans leur ancien quartier envers et contre tout et surtout parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement. Ce faisant, les entreprises du bâtiment utilisent pour la reconstruction du bois de cyprès venu du Bayou là où il assurait une protection naturelle contre les inondations…
La directrice du développement de la Ville de La Nouvelle Orléans, Donna Addkison, à qui je demandais que faire pour aider cette communauté si proche de nous me disait : « Ce qu’il faut faire en premier, c’est prier… Mais après, il faut faire pression ; pression sur les entreprises pour qu’elles reviennent travailler en Louisiane, pression sur les gouvernements pour qu’ils n’arrêtent pas de mettre la Louisiane à l’agenda de leurs discussions avec le Gouvernement des Etats-Unis, pression sur les compagnies aériennes internationales pour qu’elles rétablissent les liaisons directes et surtout ne pas arrêter de venir nous rendre visite ».
Après notre colloque, remarquablement organisé par le Consulat de France à la Nouvelle Orléans, l’émotion des élus français présents est à la mesure de la tâche que se sont fixée nos amis louisianais laquelle nous parait impossible. Mais n’est-ce pas le grand écrivain américain Mark Twain qui a écrit : « Ils ne savaient pas que c’était impossible, ils l’ont fait ! » ? Alors oui, vraiment, n’oublions pas la Louisiane…"